C’est avec vingt-cinq minutes de retard que j’arrive à mon rendez-vous Tinder de ce soir.
Elle est déjà assise, en train de boire un verre en terrasse. Je bouscule tout et tout le monde pour passer et j’oublie de m’excuser en arrivant à sa table. Elle me lance un regard noir. J’essaie d’avoir l’air détaché, mais impossible, je suis terriblement anxieux.
Elle me convainc en quelques secondes : elle est élégante, blonde, yeux bleus, très élancée, 1m80 pour 50kg.
Dans ma tête, à ce moment-là, je me dis que c’est moi qui doit prouver que je la mérite. Mauvaise chose, évidemment.
J’ai chaud, j’enlève mon pull alors qu’il fait dix degrés, je peine à sourire, j’ai honte car j’ai l’impression d’être habillé comme un adolescent.
Le serveur n’arrête pas de passer, il la drague, elle se laisse faire et j’ai l’impression de ne pas être à ma place. Je voudrais partir tellement je me sens nul.
Elle semble déçue de mon physique en vrai, qui forcément, avec cet air terrorisé que j’affiche, me rend bien moins séduisant.
Elle m’explique un peu sa vie, son boulot, ses enfants. Je tente ensuite d’expliquer de façon intéressante ce que je fais de ma vie.
Je lui explique ma vision des choses vis-à-vis des enfants et pourquoi je n’en ferai jamais. Elle prend très mal tout ce que je dis, je m’excuse, je dis que je ne voulais pas la critiquer.
« Non mais je m’en fou de ton opinion de toute façon », me rétorque-t-elle.
Les sujets à débats… Très mauvaise idée si on veut conclure ou simplement que le rendez-vous se passe bien. Je me répète, mais c’est une erreur que je fais encore et qui me nui le plus (surtout quand on est un peu marginal comme moi).
Je prends conscience du fait que tout est fichu et j’ai envie de partir. Elle me paie une seconde bière (sans doute veut-elle tout payer, car elle ne veut rien à me devoir ?).
Elle me demande à combien s’élève mon salaire. Je suis choqué et je lui dis que ça ne se demande pas. Elle me dit qu’on peut tout se dire, qu’on est des inconnus qui se sont rencontrés sur Tinder et qu’on s’en fout totalement. Elle me donne le sien, puis timidement j’ose donner le mien.
Foutu pour foutu, je lui explique que si j’ai l’air si stressé, c’est à cause de la cocaïne. J’en ai pris deux fois cette semaine et ça joue terriblement sur ma confiance en moi.
Ça n’a pas l’air de trop la choquer.
Alors, soudainement, je prends conscience du fait qu’effectivement c’est uniquement à cause de la coke que je suis dans cet état. Un état qui pourrait être normal pour une autre personne, mais pas pour moi. Je suis un excellent dragueur et je sais que c’est à elle de me convaincre d’être suffisamment intéressante pour coucher avec moi.
Ma personnalité change, je termine ma bière, je prends les devants et on bouge dans un endroit où on peut danser. Sur le chemin, je la taquine légèrement, avec un air complètement détaché. Elle ne m’impressionne plus du tout.
Nous nous rendons au Mezzo, petit bar dansant. Arrivés sur place, personne ne danse mais je commence, au milieu de la salle. Je la prends, nous dansons un peu, elle ne se montre pas très motivée.
D’autres filles commencent à danser à côté de nous. Je remarque que l’une d’entre elles me regarde. Aude (la fameuse blonde) s’en va prendre des bières. Je prends la main de la fille qui me regardait et je danse collé-serré avec elle.
Elle me dit que je ne sais pas danser. Effectivement. Mais on s’en fout ! Nous nous rapprochons sensuellement. Mais avant de l’embrasser, je la quitte pour rejoindre Aude qui vient de revenir.
Ça aurait été minable d’aller jusqu’au bout. Mais au moins, me voilà plus séduisant, car j’intéresse les autres filles. Les femmes aiment copier.
Je recommence à danser avec Aude, que je finis par embrasser très facilement.
Nous partons de là et allons chercher une autre bière dans un night-shop.
Et là, j’hallucine : alors que je tiens la blonde d’un bras lorsque nous marchons, voilà que je croise l’une de mes copines, celle que je vois la plus souvent, depuis trois mois.
Je lâche vite la blonde. La brune (Sarah) me voit, je dis à la blonde que c’est une amie, je fais un bisou moitié sur la bouche, moitié sur la joue de Sarah, je lui dis que la blonde est l’une des amies avec qui je sors en boîte ce soir.
Elle me présente ses amis et je rejoins la blonde.
Sarah n’a rien capté. Aude a compris que c’était bizarre. Je lui explique que c’est une fille à qui je n’ai pas encore osé dire que c’était terminé et qu’elle ne comprenait pas d’elle-même malgré que je ne lui répondisse plus depuis longtemps.
Je touche son corps mince, j’agrippe ses fesses galbées, toujours en affichant l’air à la fois suffisant et bienveillant que j’adore prendre. Elle me dit « Arrête, j’ai trop envie ».
Je ne lui propose pas de rentrer chez moi, car j’ai une soirée de prévue et mes colocataires m’attendent pour partir. Je la raccompagne à la gare et je la filme en train de me dire « je t’aime ».
C’est systématique, à présent. Je demande aux filles que je fréquente de me dire cela et je les filme pour pouvoir re-visionner les vidéos plus tard et me rassurer, je suppose. Je les force à me dire à quel point elles sont amoureuses de moi.
Mon bus arrive avant son train, je la plante, je lui propose un second rendez-vous, chez moi cette fois.
Je monte dans mon bus, je rentre et commence à boire du Gin. Tous les amis de mon colocataire prennent de la coke et je me sens obligé d’en prendre aussi, même si à chaque fois je me dis que cette énorme saloperie inutile, c’est terminé.
Quelques minutes suffisent pour que je me sente complètement nul, angoissé, et que le Hippolyte adolescent refasse surface.
Avec toutes les drogues, c’est pareil : j’angoisse et je redeviens mon moi de 17 ans.
Nous prenons le taxi. On passe en priorité et on évite la file énorme devant la boîte car une fille du groupe connait les organisateurs.
C’est un truc de cinglés, il y a beaucoup de gens très spéciaux, des artistes, de jeunes bourgeois « underground », des hipsters, des homosexuels. L’électro retenti dans les salles énormes.
Je suis mon colocataire et ses amis comme un petit chien. Puis je décide de les laisser, car je ne me sens pas intégré et je suis l’intru du groupe.
Tout la nuit, je zone, je bois seul, j’ai l’impression qu’on me regarde et qu’on se demande « c’est qui ce loser ? ».
Je ne comprends rien aux personnes présentes et j’ai l’impression de ne pas vivre dans le même monde qu’eux. Je demande des clopes aux gens, mais personne ne m’en donne, à part finalement un jeune entrepreneur au look décalé avec qui je discute cinq minutes.
À trois heures du matin, plus d’eau au bar. Et il n’y a pas d’évier aux toilettes, qui sont des Cathy Cabines. Angoisse. Je me déshydrate, je continue à zoner, je titube, je ne comprends plus rien.
J’enfile une paire de lunettes de soleil trouvée par terre et continue d’errer, de discuter avec de petits groupes. Draguer serait inutile, ils sont tous dans leur trip et ça n’a pas l’air d’être le genre d’endroit où la séduction a sa place. De toute manière, je n’en ai pas envie ce soir. Pour une fois, personne ne me met la pression pour que je montre mes « talents », alors j’en profite.
À six heures et demi du matin, je pars prendre un tram.
Je marche dix minutes en écoutant de la musique classique en haut-parleur sur mon téléphone. Je prends le tram. Les lève-tôt semblent m’éviter comme si j’étais un clochard. Je m’endors et je me retrouve dans le terminus du tram, vide, à presque huit heures du matin.
Je reprends un tram, je réponds aux filles qui m’ont envoyé des messages et j’organise les rendez-vous de la semaine. Par pitié, pourquoi la question qu’on pose toujours en premier sur Tinder est « Qu’est-ce que tu fais dans la vie ? ». 725 matchs sur Tinder. Beaucoup d’autres sur Happn. Je dors et je suis une épave, un déchet.
Je reste dans mon lit jusqu’à dix-sept heures et je pense à ma vie tout à fait insatisfaite, mon boulot de merde, ma vie de vaurien.
Je dois me réveiller, réaliser mes projets, réaliser mon rêve tout à fait irréaliste de richesse et de célébrité. Mais il est aussi sans doute temps que j’apprenne à accepter ma vie actuelle, que j’accepte que je ne serai jamais riche et célèbre, que j’assume qui je suis auprès des filles, que j’assume mon travail et mes défauts. Cela vient doucement.
Je suis dans mon lit, je reste un vaurien, je meurs lentement.
Voici les choses que tu peux apprendre de cet article et quelques conseils supplémentaires :
La première, c’est que la drague et la drogue sont, sans surprise, complètement incompatibles. ;-)
Cependant, l’alcool est mon meilleur wingman en soirée. Si consommé sans abus, ça désinhibe et permet de faire les choses que tu as envie de faire sans trop de barrières. À toi de voir comment tu réagis en buvant.
Autre chose : pauvre ou pas, cela n’a aucune influence sur ton game. C’est une idée fausse qu’on se fait souvent. Les filles veulent vivre des choses intéressantes, amusantes, être stimulées émotionnellement. L’argent n’a rien à voir avec tout ça. Les filles qui ne s’intéressent qu’aux hommes avec de l’argent, ça n’existe pas, ou bien c’est une très petite minorité.
C’est pareil pour moi, en fin de compte. J’ai rencontré pas mal de filles qui travaillent au Parlement Européen ces derniers temps, et le fait qu’elles gagnent bien leur vie ne change rien à la rencontre et à la façon dont je les apprécie.
Je me suis fait la réflexion l’autre soir en sortant pour la première fois au Spirito, boîte assez classe à Bruxelles. Il y avait des Porsches et des Lamborginis garées devant l’entrée et les filles étaient très apprêtées. Alors j’ai pensé que les filles qui venaient là, venaient dans le but de se faire draguer par des riches et se faire payer des verres. Que neni. Clichés. Les filles étaient là pour s’amuser. Preuve en est : l’un des amis avec qui j’étais a embrassé une fille en quelques secondes, tandis que je restais là, dans mes pensées, à me demander si ça se voyait que je n’étais pas riche.
Argent, défauts, tout ça n’a pas d’importance si tu es dans un bon état d’esprit, que tu es déterminé et que tu as confiance en toi. La drague n’est pas rationnelle. Être beau et riche ne sert à rien si on drague à moitié.
L’inner game est particulièrement important lors de la drague en soirée.
Et une dernière chose. Souvent, quand je sors avec quelqu’un qui me connait de réputation, il s’attend toujours à voir quelque chose de spectaculaire de ma part. Mais la séduction n’est pas une science exacte.
J’ai beau coucher avec énormément de filles et avoir beaucoup de succès, il y a malgré tout de nombreuses sorties où je n’arrive à rien. Il faudrait que je sois en permanence tout à fait excité et euphorique pour être performant chaque soir.
Mais je suis humain et ce n’est pas le cas. Et même si j’ai cette énergie positive, il arrive que tout rate. Il suffit de tomber sur les mauvaises filles au mauvais moment. Que je n’ai simplement pas de chance sur une soirée entière.
Il faut donc garder en tête que tout n’est pas linéaire. Et ce n’est parce que tu n’arrive à rien, par exemple, pendant un mois complet que tu n’arrivera à rien le mois prochain. Keep up the good work et sois positif.
Cher lecteur, à la semaine prochaine ! :-)
Tu l’as écrit sous coke cet article aussi non ?
Salut konsti et merci pour tout. J’étais amoureux d’une fille. Je lui ai avoué mes sentiments, mais elle a dit qu’elle a déjà un copain et qu’elle ne veut pas le décevoir. C’était difficile pour moi de lâcher prise, mais je me suis retiré quand-même, mais à chaque fois qu’on se croise dans la rue elle me fixe un regard comme si elle avait quelque chose à me dire, alors voici ma question : dois-je encore aller la voir ? Ou dois-je l’oublier et que peut bien signifier ce regard ?
Salut Druid.
Avec plaisir, mais pour cet article c’est Hippo que tu dois remercier.
Oui, la prochaine fois, va lui parler.
Plusieurs choses :
Comment le savoir ?
En allant lui parler.
Si elle ne voulait vraiment plus avoir affaire avec toi, elle t’éviterait du regard.
En bonus, je t’invite à lire cet article :
Tu es amoureux et tu as mal. Voici 3 trucs pour stopper la souffrance !
Je te préviens, il n’est pas facile à mettre en oeuvre.
Courage !
J’adore tes articles. Hâte de te relire.